Les
Enfarines de Cassaniouze |
Ce petit document retrace non pas l'histoire des "Enfarinés" de Cassaniouze" mais plutôt l'histoire de leur mouvement dans la haute Auvergne et le nord-Aveyron.Il faut savoir que leur mouvement débuta en 1801 du au refus des mutations religieuses ,en effet ils rejetèrent alors le concordat qui venait d'etre signé entre Bonaparte et le pape Pie VII .Ils le jugèrent de trahison et dès lors,se disant de la petite église,ils se coupèrent du clergé de la nouvelle compromission. Un groupe d'Enfarinés existait donc au hameau de La Bécarie (commune de Cassaniouze).Ils vivaient en autarcie complète,ils eurent leurs propres prêtres,même quand ils furent sans pasteur,toujours irréductibles,ils se baptisèrent,prièrent ,se mirent en terre entre eux,sauvagement a l'écart.Ils possédait leur propre chapelle au hameau de La Bécarie et une fois par mois ou l'an ?, l'un d'eux venait au bourg de Cassaniouze (7 km depuis La Bécarie)pour les besoin matériels. Pour bien montrer leur attachement et leur appartenance au passé,ils continuèrent ostensiblement a se poudrer les cheveux a la farine,a la manière de l'ancien régime,d'ou l'expression "Enfarinés". Les derniers de ces "Enfarinés" vivaient encore au hameau de La Bécarie en 1911,date a laquelle les derniers survivants firent leur soumission a l'Eveque de Saint-Flour qui se déplaça dans leur village pour la circonstance.Dès lors ,on raconte que ce jour là ,la route fut fleurie depuis le village de Ruayres,le week-end suivant ces derniers enfarinés se rendirent a l'église de Cassaniouze,devant la curiosité de la population. Maints propos et "on-dits" ont été tenus a leur égards mais il faut savoir qu'ils avaient choisis leur propre voie de la sagesse et nous ne pouvons en dire plus et rejeter leur mode de foi et de vie. Jean-Francois Souquières Ecrits de Mr TRIN Tous ceux qui s'intéressent d'un peu près à l'histoire religieuse connaissent l'origine de la "Petite Eglise". Ce schisme, né au moment du Concordat de 1801, eut pour origine le refus de plusieurs évêques français de se démettre de leurs sièges comme le leur demandait le pape Pie VII. Ce désir du pape était motivé par la nécessité de donner au pays un épiscopat neuf sans attache avec l'Ancien Régime, comme le demandait Bonaparte. Parmi les opposants, il y avait l'évêque de Rodez, Mgr Seigneley Colbert. Beaucoup de ses diocésains lui demeurèrent fidèles et le suivirent dans le schisme, de sorte que plusieurs paroisses de l'Aveyron refusèrent de reconnître le nouvel évêque. Parmi ces paroisses, il faut citer Notre-Dame d'Aynès et Grand-Vabre, limitrophes de Cassaniouze et Vieillevie. Le Lot qui sépare les deux départements n'empêche pas les idées anti-concordataires de se répandre et quatre paroisses au moins, de la Châtaigneraie adhérèrent au schisme: Cassaniouze, Vieillevie, Ladinhac, Saint-Projet. Disons en passant que d'autres localités du Cantal eurent aussi leur "petite église", par exemple Saint-Illide dans le canton de Saint-Cernin. Les "adhérents" à ce schisme étaient surnommés "les Enfarinés", parce qu'ils portaient les cheveux longs, comme bien des gens avant la révolution, et qu'ils les poudraient avec de la poudre de riz ou plus simplement avec de la farine. Leurs chefs étaient les abbés Delhom originaire de Thérondels, et Régis né à Villecomtal. A partir de 1810, le schisle s'étiole, faute de prêtres. Les fidèles, observateurs stricts de la morale catholique, continuèrent leurs réunions du dimanche, leurs lectures pieuses, leurs longues prières. Ils se baptisaient eux-mêmes, n'entraient pas dans les églises et n'admettaient pas de prêtres au chevet de leurs malades. Les obsèques se déroulaient simplement au cimetière, présidées par le plus ancien des Enfarinés. Cassaniouze eut le monopole de la persévérance dans cette pénible erreur, car la Petite Eglise y survécut jusqu'en 1911, année où Mgr Lecoeur, évêque de Sint-Flour, vint recevoir l'bjuration des derniers Enfarinés qui vivaient au hameau de la Bécarie. Signalons que la dernière survivante de ces convertis mourut en 1929, âgée de 88 ans. Le curé de Cassaniouze en 1911 était l'abbé Gibial. Il publia en 1912 une histoire de la "Petite Eglise" remplie de détails pittoresques. Grâce à elle nous savons que ce fut le vicaire Bernard Souquières, qui, au lendemain de la Révolution, propagea le schisme. Réfractaire, il avait vécu caché dans les cavernes et les bois qui plongent dans le Lot durant plusieurs années, répondant au péril de sa vie aux appels des chrétiens qui réclamaient son ministère. Traqué par les gendarmes de Montsalvy, il put toujours leur échapper. En 1801, il refusa de reconnaître le nouvel évêque de Saint-Flour, Mgr de Belmont, et il se retira dans sa famille au Prat. Son prestige demeurait cependant très grand dans toute la Châtaigneraie et les gens venaient de loin pour assister à sa messe et entendre ses sermons. Plusieurs fois il fit venir au Prat et dans les villages de Ladinhac les abbés Régis et Delhom. L'abbé Souquières mourut en 1808 sans être réconcilié avec l'église et les prêtres aveyronnais ont continué à venir prêcher dans la Châtaigneraie, formant des cathéchistes et apprenant aux plus pieux à exhorter les mourants. Mgr de Belmont, nouvel évêque de St-Flour, ne voulant pas que ces chrétiens dissidents fussent inquiétés. Il comptait avec raison sur le temps pour user le schisme . Mais nous venons de le dire, il fallut attendre plus d'un siècle - jusqu'en 1911 - pour le voir disparaître totalement. Il m'a été donné, il y a dix ans, de visiter le hameau de la Bécarie, dernier refuge de ces chrétiens intransigeants que furent les membres de la famille Malbert. Distant de sept kilomètres de Cassaniouze, surplombant la vallée du Lot, la Bécarie se présenta à mes yeux étonnés avec ses quatre bâtiments couverts de tuiles grises. Au fond du ravin le Lot roulait ses flots verdâtres. Face au modeste hameau le village aveyronnais de la Vinzelle s'érigeait sur un éperon rocheux. De l'autre côté de la rivière, on voyait Grand-Vabre et la chapelle Saint-Roch. Partout des bois et des rochers semblant prêts à plonger dans les eaux attirantes; et sur toute cette nature solitaire tombait un silence Dans la cour de la ferme une fontaine, des réservoirs pour économiser l'eau, plus bas, une treille, un champ pour le chanvre, des vignes, des jardins. Ici on vivait en économie fermée. Nous entrons dans la maison, accueillis par une parente des Malbert. Elle parle d'eux avec respect. Elle nous montre des photographies. Voici la cheminée dominée par un vieux crucifix. "C'est le Christ que priaient mes parents. Il n'a pas bougé de là". A côté, la chapelle où ils faisaient leurs longues prières et où ils lisaient la Bible. Le dimanche, avec les domestiques, ils récitaient l'ordinaire de la messe, et le soir les vêpres.Durant tout le Carêùe, on ne mangeait ni viande, ni ufs. On ne se servait ni de beurre ni de crème. On faisait la soupe à l'huile et toute la famille jeûnait tous les jours jusqu'au Samedi-Saint. Jamais on ne travaillait le dimanche, ni même aux fêtes supprimées par le Concordat. Dans la cuisine, assis autour de la table, nous parlons des ancêtres, et de la dernière, l'austère Jeannou. Dans mon esprit, j'évoque la scène du 9 mai 1911, qui vit la rentrée dans l'Eglise de ces admirables réfractaires, dignes émules des religieuses et des messieurs de Port-Royal. Je crois voir la majestueuse figure de Mgr Lecoeur qui reçut l'abjuration des Malbert at qui leur donna le sacrement de Confirmation Peu à peu meurent ceux qui les connurent de près. En 1964, le petit Lassale, devenu un vieillard chenu et qui avait assisté à la cérémonie de 1911, vivait au village de Ruayre. Il y réside peut-être encore Sur Marie-Odile, religieuse de la Sainte-Famille à Aurillac, se souvient toujours de l'arrivée du bel évêque à la Bécarie et de la bénédiction qu'il lui donna avec son sourire inoubliable et sa bonté majestueuse. Quelques vieillards conservent le souvenir ému de Jeanne Malbert qui, chaque matin, venait, à jeun, à l'église de Cassaniouze, entendre la messe et communier. Sept kilomètres aller, Sept kilomètres retour, ne faisaient pas peur à cette convertie. Elle repose maintenant au cimetière du bourg avec les siens. |
Ecrits datant de l'année 1860 environ